Entre tradition classique et imaginaire germano-celtique. Les monstres anthropomorphes des mers septentrionales, au Moyen Âge et au début de l'époque moderne.
Proposition de communication (J. Leclercq-Marx)
Les triton(e)s, divinités gréco-romaines bienveillantes, sont bien connu(e)s, tant par les descriptions dont ils/elles ont fait l'objet que par leurs représentations. Mais à part eux/elles, aucun autre type de monstre anthropomorphe n'a été localisé en Méditerrannée dans l'Antiquité, si ce n'est Scylla qui est une figure mythologique. La situation est très différente dans les mers nordiques, à l époque médiévale. En effet, cette catégorie d'hybrides y apparaît un peu plus fournie, davantage diversifiée et désormais ambivalente, les valeurs positives dont ceux-ci sont parfois porteurs semblant directement liées à leur culture d'origine ou d'« adoption », à l'inverse de leurs connotations négatives résultant de la diabolisation dont le monstrueux a fait l'objet par l'Église.
Si on se réfère aux sources écrites - principalement les encyclopédies, les bestiaires, les chroniques et les romans en langue vernaculaire - on dénombre quatre monstra marina en partie anthropomorphes spécifiques aux mers septentrionales : les moines-, les chevaliers- et plus tardivement, les évêques de mer, auxquels on peut ajouter les sirènes dont la métamorphose en poisson est intervenue en milieu germano-celtique. Sans compter les ondin(e)s qui ne présentent aucune tératologie mais dont l'habitat est marin.
La présente communication se propose de présenter brièvement cette faune très particulière, de préciser le contexte dans lequel elle s'est développée, et d'expliquer les raisons de son extraordinaire succès, tant dans le domaine de l'écrit que dans celui de l'art et même de l'héraldique. Ainsi, il sera d'abord question d'un imaginaire dominé par l'élément marin et imprégné de la croyance en un monde marin symétrique du monde terrestre. Puis, de l'histoire particulière de chaque hybride concerné - qu'elle commence à l'Antiquité ou qu'elle soit ancrée ab initio dans les cultures septentrionales. On constatera alors que quel que soit le cas, celles-ci ont joué un rôle déterminant dans l'élaboration et/ou dans l'évolution de leur concept, voire même dans celui de leur forme, comme on l'a vu dans le cas de la sirène.
On terminera enfin en se demandant pourquoi l'homme et la femme-poisson ont fini par devenir une sorte de motif passe-partout dans l'illustration de certains grands traités d'histoire naturelle de la fin du Moyen Âge : dans l'Hortus sanitatis, ils ont prêté leurs formes à une demi-douzaine d'autres monstres que la tradition textuelle présente sous une toute autre morphologie.
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